Le scénario catastrophe

 

Par un bel après midi d’été, évidemment, nous terminions le barbecue. Jean-Michel, comme à son habitude, a pris le seau, l’a rempli consciencieusement de l’eau bien fraîche qu’il est allé recueillir au puits. Et vlan ! un seau d’eau sur les grilles brûlantes ! Un crépitement,  un grésillement, et une brûlure au poignet pour ma cousine Mathilde. Par réflexe, elle a bondi de son fauteuil, le renversant sur les reliefs de la délicieuse tarte aux prunes de tante Marie. Sauf que, bien sûr, les guêpes en avaient fait leur festin.
Tante Marie s’est mise à hurler : « Attention aux guêpes ! » Oncle Arthur qui s’était endormi dans son fauteuil s’est réveillé en sursaut, il hurlait : « Les Allemands, les Allemands sont à nos portes ! » Du coup le bébé d’Emeline, effrayé, s’est mis à pleurer à gros sanglots en appelant sa mère qui faisait la vaisselle à la cuisine. Celle-ci, affolée, a lâché l’assiette qu’elle essuyait.
« Bling » fit celle-ci en éclatant par terre dans un bruit de fin du monde. Alertés par le vacarme, Jean-Michel, Mathilde, Marie, Arthur et Emeline accoururent ventre à terre. Le bébé d’Emeline qui n’avait que huit mois se leva d’un bond et fit ses premiers pas à cette occasion. Titubant d’une démarche mal assurée jusqu’au lieu de la catastrophe il perdit l’équilibre et tomba sur les morceaux de céramique. Personne n’y prêta attention puisque c’est à cet instant que le barbecue laissé sans surveillance explosa.
Ce fut un nuage de cendres qui se déversa dans le jardin. Alors que Jean-Michel tentait de dissiper la fumée avec un torchon, il marcha sur la tarte aux prunes tombée par terre. Il ne se fit pas piquer par les guêpes, qui avaient déguerpi avec la fumée, mais il glissa sur la table. Un couteau vola, sa trajectoire le menant tout droit vers le bébé d’Emeline, qui continuait de marcher le sourire aux lèvres.
C’est à ce moment que le vent se mit à souffler si fort que le couteau se dirigea vers Arthur, qui maintenant était en super forme. Il attrapa le couteau et le lança sur la cible : 1 000, bravo !
Le bébé d’Emeline, à peine assuré sur ses jambes, les genoux ensanglantés, se précipita dans les jupons de sa mère. Mais le vent si fort souleva les jupes d’Emeline, et le bébé se retrouva fort bien caché. Fumée dissipée, couteau en plein cœur de la cible, guêpes envolées, chacun souffla de soulagement. Jusqu’au cri d’Arthur : « Et le bébé ?! »…
Un « ouin » retentissant du jeune enfant vint enfin clore ce barbecue dominical. Vive la tarte aux prunes !
La page qui tourne